Koen Geens (CD&V): J'ai évoqué ce dossier avec la prédécesseure du ministre Vandenbroucke dès 2015. Mes interventions en CIM de la Santé publique ne m'ont pas donné l'impression que des progrès rapides pouvaient être réalisés dans ce dossier, ce qui me préoccupe grandement. Il est clair en effet que la Justice paiera la prime d'assurance.
En quoi la Santé publique s'opposerait à un ministre qui paie une prime d'assurance maladie pour ses 10000 détenus? En outre, il est évident que le système d'honoraires pour les médecins qui se rendent en prison consistera en des montants forfaitaires. Il me semble que cela ne constitue pas un problème majeur non plus.
Il est également important de préciser que nous ne parlons que de 10 000 personnes qui se voient accorder le droit à des soins physiques appropriés. Il ne s'agit pas de faits purement symbo- liques. Les suicides en prison ne sont pas exceptionnels. Il arrive que des détenus réclament un médecin qui n'arrive pas et meurent quelques heures plus tard.
On trouve en prison tous types de personnes. Elles ont toutes droit à une assurance maladie. Je demande du fond du cœur que l'on continue à défendre ce droit. J'adresserai également ma demande au ministre de la Santé publique.
Vincent Van Quickenborne, ministre: Chers collègues, j'ai en effet reçu un courrier des médecins et de la commission de surveillance de la prison de Lantin. Je leur ai répondu rapidement et j'ai proposé une rencontre qui a eu lieu le 14 juin.
La concertation entre la délégation, mon cabinet et l'administration de la direction générale des établissements pénitentiaires me semblait avoir été constructive mais la délégation m'a cependant fait savoir lundi, un peu avant minuit, que dans l'attente d'une réponse écrite satisfaisante de notre part, elle maintenait la suspension des activités à partir de ce mardi 15 juin. Je ne peux que regretter cette position tant sur le fond que sur la forme. Des actions de suspension sont donc menées mais la déontologie impose le respect de la continuité des soins.
Le bon fonctionnement des services de santé de l'administration pénitentiaire ainsi que la rémunération adéquate de ceux qui y travaillent constituent pour moi une priorité. C'est précisément pour cette raison que la réforme de ces services, de leur organisation et de leur méthode de travail a été inscrite dans l'accord de gouvernement fédéral le 1er octobre 2020. Pour la mettre en oeuvre, j'ai donné instruction à mon administration de reprendre les activités des groupes de travail mis en place dans le cadre de cette réforme lors de la précédente législature. Lors d'une réunion entre la Justice et la Santé publique le 28 mai dernier, le texte de vision élaboré par le précédent groupe de pilotage a été définitivement validé et il a été décidé que les différents groupes de travail devaient reprendre leurs activités.
La prochaine réunion entre les présidents des groupes de travail est prévue pour le 23juin. Le groupe de pilotage sera également reconstitué. Tous ceux qui ont participé à un stade antérieur à ce comité de pilotage et/ou aux différents groupes de travail seront à nouveau invités.
Il a été décidé que l'intégration de détenus à l'INAMI constituera la première phase et que le déploiement ultérieur de la prise en charge se fera par étapes. Il s'agira d'un plan pluriannuel. Aucune date concrète ne peut encore être donnée à ce sujet même si ce dossier avance de façon très concrète. Il y a d'une part le budget et d'autre part, les réformes à mener.
S'agissant des prestations, celles-ci seront indexées à partir du 1er juin, ce qui n'avait plus eu lieu depuis 2012. Concrètement, cela représente une indexation de 7,84 % pour la plupart des prestations, dont celles des psychiatres, et de 3,1 % pour les soins infirmiers et les psychothérapeutes.
Une des demandes porte également sur le programme informatique utilisé qui est de fait dépassé. Là également, je soutiens pleinement toutes les avancées favorisant la digitalisation de mes services.
Évidemment, cela inclut la refonte du dossier électronique du patient. Le service mérite un programme qui soit facile à utiliser et qui permette un échange optimal de données avec les prestataires de soins externes.
Un premier dossier visant à l'installation d'un nouveau programme avait été préparé par mon prédécesseur, mais à l'époque, le dossier n'avait pas pu aboutir car la société qui avait soumissionné pour le marché ne présentait pas de garanties suffisantes. Alors, mon administration a finalisé un nouveau cahier des charges pour un nouveau programme médical qui soit non seulement user friendly, mais aussi un programme prêt à l'emploi.
Outre sa facilité d'utilisation, ce programme sera également compa- tible avec la plate-forme e-health, de sorte que la communication avec les partenaires extérieurs de la prison pourra se dérouler rapidement et facilement, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui.
Ce nouveau programme sera également utilisé par l'Office des Étrangers et le cahier des charges a été développé avec sa collaboration. Le dossier sera soumis à l'Inspection des Finances encore ce mois-ci. La publication de ce cahier des charges devrait donc se faire cet été pour un déploiement prévu à l'automne 2021.
Vous voyez, chers collègues, qu'il est erroné de penser que les choses ne bougent pas, car de nombreuses actions sont en cours grâce à mon cabinet et à l'administration. Elles apportent et apporteront des solutions aux problèmes évoqués dans ce courrier. Mais vous conviendrez que des étapes comme le transfert des soins de santé des prisons vers les SPF Santé publique ne peuvent se faire sans une nécessaire réflexion et une préparation - j'en ai déjà discuté longuement avec mon collègue Franck Vandenbroucke.
J'ajoute que, lors de ce transfert, les montants des prestations seront également de nouveau analysés avec attention. Ma lettre écrite a été envoyée encore aujourd'hui. J'attends maintenant une réaction. J'espère que nous pourrons continuer à travailler ensemble pour des solutions à long terme, sans pression d'actions.
Enfin, pour répondre à la question de M. Parent relative au nombre de psychiatres à la prison de Lantin, au 15 juin, la population de cet établissement était de 752 détenus et de 62 détenues, soit un total de 814 personnes, pour lesquelles la prison dispose en principe de deux psychiatres de soins et de trois psychiatres attachés aux services psychosociaux. Je confirme qu'un psychiatre de soins a démissionné, et que nous sommes à la recherche d'un remplaçant, ainsi que d'un troisième psychiatre SPS. Comme j'ai déjà eu l'occasion de le signaler dans cette commission, il y a malheureusement pénurie de psychiatres sur le marché.
Quant aux médecins généralistes attachés à l'établissement pénitentiaire, ceux-ci sont au nombre de 12. En ce qui concerne la rotation des médecins, elle est limitée voire très limitée. Il est en effet rare qu'une personne démissionne. Les départs se font généralement en raison de l'âge. Il n'est cependant pas toujours facile de trouver des médecins pour les remplacer.
Je vous remercie.
L'incident est clos.