La population vieillit et les seniors très âgés vivent plus longtemps. Malgré l’absence de statistiques exactes, la tendance est là : le nombre de personnes placées sous protection judiciaire parce qu’elles ne sont pas (ou plus) en mesure de gérer leur vie ou leurs finances est en hausse. Le juge de paix peut décider de désigner un administrateur chargé de veiller à leurs biens ou à leur personne. Il s’agit soit d’un membre de la famille, soit d’un professionnel (la plupart du temps, un avocat). D’après le Registre national, on comptait, fin 2018, plus de 113 000 personnes sous administration.
Le Conseil supérieur de la justice (CSJ) a scruté, pendant deux ans, la manière dont les juges de paix désignent les administrateurs, contrôlent la gestion administrative et financière des dossiers et préviennent le risque d’abus.
Que ressort-il de cet audit sur le contrôle des administrations exercé par les justices de paix, rendu public mardi ? Plusieurs clignotants sont au rouge et montrent que la gestion devrait être largement améliorée. C’est le cas de la sélection des administrateurs qui mérite une attention particulière, souligne le CSJ. Elle se fait aujourd’hui “trop souvent sans critères précis” et “laisse une grande place à l’intuition” . Cela ne signifie pas que l’ensemble des administrateurs actuels ne sont pas de qualité, mais cela augmente le risque que des administrateurs qui ne sont pas compétents ou fiables soient désignés, lit-on dans l’audit.
Pour le confort du juge…
Autre souci : le souhait du législateur de voir désignés, de préférence, des administrateurs familiaux n’est pas toujours respecté. Il ressort même de l’audit que le choix se porte dans la plupart des cas sur un avocat.
Pourquoi ? Les raisons sont diverses : il n’y a pas d’administrateur familial disponible ; il existe un contentieux au sein de la famille ; personne dans l’entourage de la personne à protéger ne dispose des compétences nécessaires pour cette tâche…
Mais il apparaît aussi que, trop souvent, le choix d’un avocat comme administrateur vise le confort du juge de paix. Partant du principe que le travail effectué par les professionnels serait de meilleure qualité, la charge de travail du magistrat contrôleur serait moins lourde… “Le risque est réel que l’option retenue par la justice de paix privilégie l’impact moindre pour son propre fonctionnement” , au détriment de l’intérêt de la personne à protéger et de la volonté du législateur, épingle le Conseil supérieur de la justice.
Une réponse aux lacunes
Réagissant mardi, le cabinet du ministre sortant de la Justice, Koen Geens (CD&V), a annoncé, pour la fin août, un projet de loi visant à répondre aux lacunes épinglées par le CSJ.
Le texte en préparation (malgré les affaires courantes) prévoit des critères de sélection pour les futurs administrateurs, qui devront, notamment, suivre une formation reconnue, souscrire à un code de déontologie, ne pas avoir encouru de sanctions pénales et disposer d’une assurance responsabilité professionnelle.
Les juges de paix seront autorisés à noter des remarques dans les dossiers individuels d’administration lorsque l’administrateur ne satisfait pas aux objectifs.
Le nouveau projet de loi précisera de façon explicite que le juge de paix devra rechercher en priorité un administrateur dans la famille ; le choix d’un administrateur professionnel se fera par défaut.
An.H.
En Belgique, plus de 113 000 personnes sont aujourd’hui placées sous protection judiciaire parce qu’elles ne parviennent pas (ou plus) à gérer leur vie toutes seules.
An.H.