Indemniser les victimes de crimes graves et leurs proches dans les enquêtes qui n’aboutissent pas après des années, c’est une première européenne sinon mondiale. Koen Geens veut indemniser les cold cases. Selon nos informations, le ministre de la Justice prépare un projet consistant à octroyer une aide financière supplémentaire, dans les instructions judiciaires dites de longue durée, aux victimes et proches de victimes de faits criminels graves dont le ou les auteurs et leurs motifs n’ont pas encore été identifiés. Une aide spécifique, précise le ministre, liée à “l’incertitude de longue durée concernant l’identité du ou des auteurs, et à leurs motifs” .
Koen Geens veut étendre à tous les cold cases ce projet d’aide qu’il évoquait en décembre en le limitant à ce moment à l’affaire des tueurs du Brabant. Au cabinet du ministre, Marie Landsheere, porte-parole, confirme : “D’autres cold cases que les tueries du Brabant pourront faire partie de cette aide particulière, tant que l’instruction est en cours. Après conclusion de l’enquête, cette aide ne vaudra plus que pour une période limitée.”
À défaut pour l’enquête sur les tueries d’aboutir, il s’agira de la troisième modification législative importante en faveur des victimes en général apportée par ce dossier. Après la création dès 1985 de la Commission pour l’aide aux victimes et la prolongation de la prescription des poursuites pénales pour les crimes graves qui, de 20 ans, a finalement été portée en 2015 à 40 ans maximum. Concrètement, cette aide cold case sera octroyée, après examen du dossier, par la Commission pour l’aide financière aux victimes d’actes intentionnels de violence.
À La DH , Koen Geens ajoute : “Nous analysons les pistes légales visant à octroyer une aide supplémentaire aux victimes dans les instructions qui prennent beaucoup de temps, où les auteurs restent inconnus. Le dossier des tueurs du Brabant en est l’exemple par excellence. Il n’en demeure pas moins que nous tentons de reconnaître la souffrance des victimes qui se trouvent dans la même situation”.
Exemple d’un cold case pour lequel aucune aide ne sera accordée : l’assassinat de Christine Van Hees le 14 février 1984 (affaire dite de la Champignonnière). 30 ans d’enquête n’ont pas abouti mais ce cold case n’est plus en instruction, le non-lieu ayant été prononcé en mai 2014.
Exemple de cold case qui donnerait lieu à la nouvelle aide : l’assassinat de Christiane Heiser, cette étudiante luxembourgeoise tuée le 9 novembre 1992 sur le site de l’ULB à Etterbeek. L’affaire est toujours en instruction au parquet de Bruxelles et, selon les derniers commentaires des porte-parole, “fait l’objet de nouveaux devoirs d’enquête”.
À partir de quel délai une affaire non élucidée donnera-t-elle lieu à la nouvelle aide ? À combien s’élèvera-t-elle ? Hier, Marie Landsheere ne pouvait fournir de précisions. “C’est précisément ce que le ministre est en train d’examiner actuellement.”
Gilbert Dupont