En quatre ans, le nombre de demandes de changement de prénom introduites par des personnes transgenres a augmenté de 136 %, selon les chiffres fournis par le ministre de la Justice, Koen Geens (CD&V), en réponse à une question écrite de la députée CD&V Sonja Becq.
En 2011, 49 demandes avaient été faites pour l’ensemble du pays. Quatre ans plus tard, on en comptait 116. C’est au Nord du pays que l’on doit cette très nette augmentation. En 2011, 29 néerlandophones transgenres avaient demandé un changement de prénom, contre 86 en 2015 (+ 196 %). Côté francophone, la hausse est plus modeste : de 20 en 2011 à 30 en 2015 (+ 50 %).
Les mineurs aussi
A noter que de plus en plus de mineurs font cette demande, moyennant l’accord de leurs parents. En 2011, on en comptait un seul. En 2015, ils étaient 16. Ici aussi, les néerlandophones étaient les plus nombreux (14).
Interrogée sur cette différence entre les deux Communautés du pays, l’ASBL Genres pluriels, qui soutient les personnes transgenres, n’a pas d’explication claire et nette. Max Nisol, psychologue et membre fondateur de l’association, émet tout de même une hypothèse : l’influence qu’exerce, en Flandre, un groupe de professionnels de la santé mentale, qui tend à psychiatriser les personnes transgenres, à les considérer comme des “fous”.
Selon la loi belge, le changement de prénom pour les transgenres requiert en effet que deux conditions soient remplies : qu’un psychiatre atteste que l’intéressé a “ la conviction permanente et irréversible ” d’appartenir à l’autre sexe; et qu’un endocrinologue certifie qu’il subit ou a subi un traitement hormonal afin d’induire les caractéristiques sexuelles corporelles du sexe auquel il est convaincu d’appartenir.
Une fois le changement de prénom effectué, un changement de genre administratif peut se faire (le M ou le F sur la carte d’identité), moyennant une condition supplémentaire, explique Max Nisol : “une chirurgie génitale” .
Pour Genres pluriels et les autres ASBL qui défendent les droits des transgenres, ces critères à remplir illustrent la façon inappropriée dont on considère les trans en Belgique. “Mais ces personnes qui changent de prénom ne représentent qu’une infime minorité, car des études ont montré que 3 % de la population belge est trans” , affirme M. Nisol.
Le droit de décider qui l’on est
Ces associations militent pour que le gouvernement fédéral revoie la loi du 10 mai 2007 relative à la transsexualité. Ce point figure d’ailleurs dans l’accord de gouvernement Michel. “Nous avons rencontré lundi la chancellerie du Premier ministre , confie Max Nisol. Nous lui avons présenté une ébauche de projet de loi.” Le premier axe de celui-ci n’est autre que la dissociation de la reconnaissance du genre à l’état civil de tout parcours psychiatrique et médical.
“Les personnes transgenres n’ont pas envie d’être vues comme des malades mentaux , conclut Max Nisol. Ils ont le droit de décider qui ils sont.”