La Belgique est en tête du classement du CRIN en termes d’accès des enfants à la justice. Mais tout n’est pas parfait pour autant.
Bernard De Vos, délégué général aux droits de l’enfant, se félicitait hier matin de la première place accordée à la Belgique, dans un classement du Child rights international network (CRIN), en termes d’accès des enfants à la justice. «Nous avons une longue tradition de respect et de promotion des droits de l’enfant» , a-t-il déclaré sur La Première.
197 pays ont ainsi été classés sur base des moyens juridiques donnés aux enfants pour combattre les violations de leurs droits. Le Portugal, l’Espagne, la Finlande et les Pays-Bas complètent le Top 5.
Le rapport du CRIN démontre en tout cas qu’aucun pays au monde ne protège parfaitement l’accès des enfants à la justice. En Belgique, la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant est entrée en vigueur en 1992 et fait partie intégrante du droit interne. À ce jour, 94 pays ont totalement incorporé la Convention dans leur droit interne.
«Entrée en vigueur ne veut pas dire complètement appliquée, souligne cependant Valérie Provost de la Coordination des ONG pour les droits de l’enfant (CODE), qui regroupe 14 associations et qui veille à la bonne application de la Convention. Nous saluons cette première place mais il reste beaucoup de travail à faire. L’accès à la justice reste problématique en Belgique pour les personnes vulnérables, dont les enfants. Ce classement veut peut-être dire que la situation est catastrophique dans les autres pays…»
«L’enfant ne va jamais lui-même en justice»
En Belgique, les enfants doivent être représentés par un parent ou un tuteur pour initier une procédure. «L’enfant ne va jamais lui-même en justice sauf quelques exceptions (conflit d’intérêts majeur entre l’enfant et les parents, absolue nécessité, etc.), note Valérie Provost. Il est représenté par un parent ou un tuteur qui peut ne pas toujours prendre en compte l’avis de l’enfant.»
Bernard De Vos estime, lui, qu’il faudrait donner la possibilité à un mineur d’ester seul en justice, sans devoir recourir obligatoirement à l’assistance de ses parents.
Autre caractéristique du système belge: lorsque l’enfant a plus de 12 ans, le juge doit l’entendre dans toute procédure le concernant. Lorsqu’il a moins de 12 ans, le juge peut le solliciter mais ne le fait pas toujours. Selon le rapport, 58 pays ne reconnaissent pas du tout le droit de l’enfant à être entendu.
Selon la CODE, la Convention des droits de l’enfant n’est pas suffisamment invoquée dans les tribunaux. «Les jeunes eux-mêmes ne savent pas comment mobiliser et valoriser leurs droits, note aussi Valérie Provost. Et puis la justice n’est pas vraiment adaptée aux enfants. Elle reste une grande nébuleuse pour les jeunes et est inquiétante.»
Valérie Provost pointe en outre la formation des magistrats et des avocats: «Entendre un enfant ou accompagner un enfant face à la justice, c’est à la croisée entre le psychologique et le droit. Ce n’est pas toujours bon, par exemple, d’accueillir un enfant en toge dans une grande salle de tribunal…»
Par ailleurs, la CODE estime qu’il faut améliorer la relation entre les jeunes et la police, souvent première étape avant l’accès aux tribunaux. «Les enfants ne savent pas toujours ce que la police peut faire et ne pas faire» , dit Valérie Provost.
La gratuité remise en cause?
Enfin, le délégué général aux droits de l’enfant dit craindre que le ministre de la Justice, Kœn Geens, ne revienne sur la gratuité des frais de justice pour les mineurs, dans le cas où les parents sont capables de subvenir aux besoins financiers.
Ca.F.