Nouvelle passe d'armes entre des magistrats bruxellois et Koen Geens . Les juges de la jeunesse, dénonçant un manque d'effectif .
Le ministre de la Justice répond que le tribunal de première instance a assez de moyens .
Il dit également que ce même tribunal n'a jamais répondu à une demande du ministre concernant les besoins les plus urgents. Des recrutements sont en cours et le ministre s'est engagé à remplir le cadre.
Nicolas Keszei
" Aujourd'hui, il n'est plus pensable, il n'est plus humainement tenable, d'aller plus loin. " La lettre envoyée par 13 magistrats du tribunal francophone de la jeunesse de Bruxelles au ministre de la Justice Koen Geens (CD&V) relève plus du cri du cœur que de la sonnette d'alarme.
Des greffes désertés
Ces signataires, qui dénoncent un déficit de plus de la moitié des employés du greffe central et des chambres du tribunal de la jeunesse, ont fait savoir qu'ils n'étaient plus en mesure d'assurer des audiences dans de bonnes conditions. C'est particulièrement le cas dans la 12e chambre de ce tribunal qui vient de perdre son greffier, compliquant la tâche de la juge qui préside ladite chambre. " Il est évident qu'en l'absence de tout greffier, cette magistrate ne peut prendre pendant ses services aucune décision par ordonnance avec pour conséquence, notamment, la libération des détenus qu'elle serait amenée à recevoir ", peut-on lire dans la lettre envoyée au ministre de la Justice. Fort de ce qui précède, ce sont les 13 juges du tribunal francophone de la jeunesse qui ont fait savoir qu'ils " n'assureraient plus le service des mineurs détenus qui seront, par voie de conséquence, systématiquement libérés, et ce à dater du jeudi 15 octobre 2015 ".
Les juges qui dénoncent le non-remplissage de l'effectif du cadre des greffiers, craignent également le départ en masse d'employés. En quelques mois, disent-ils, l'effectif des employés du tribunal de la jeunesse a fondu de 50%. Ces départs s'expliquent, entre autres, par les demandes de mutation de personnel formé mais rebuté " par les conditions posées par un cadre linguistique qui leur empêche tout avancement ".
Les signataires de la lettre ont fait savoir qu'ils reprendraient leur mission normalement quand le cadre des effectifs de greffiers et d'employés sera correctement rempli.
Assez de moyens
La réponse du ministre de la Justice ne s'est pas fait attendre. Il a répondu par un communiqué dont le titre ne laisse aucun doute quant au contenu. " Le tribunal de première instance francophone à Bruxelles reçoit suffisamment de moyens. "
Le ministre, qui dit regretter au plus haut point une action comme celle des juges du tribunal de la jeunesse, a rappelé qu'il avait dégagé un budget de 7,5 millions d'euros pour " répondre aux besoins les plus aigus à court terme dans les tribunaux et parquets ainsi que pour diminuer la charge de travail ". Aujourd'hui, alors que 5 millions d'euros de cette enveloppe sont toujours disponibles, Koen Geens explique que le tribunal de première instance francophone de Bruxelles - dont dépend le tribunal de la jeunesse - n'avait pas répondu à sa demande.
Koen Geens, qui précise que les sélections sont en cours pour engager 444 personnes - dont 150 pour Bruxelles -, a rappelé qu'il avait pris un engagement politique pour remplir le cadre du tribunal de première instance francophone de Bruxelles à 100%. Concernant le détail des chiffres, le ministre a fait savoir que 34 postes de greffiers étaient vacants sur un cadre de 134. À la suite d'un appel publié cet été, 18 places devraient être pourvues d'ici fin octobre, tandis que 9 postes non pourvus précédemment le seront dans le courant du mois de novembre, ce qui, dit le ministre, devrait porter le taux de remplissage à 127 places sur 134. " Je travaille à court terme et à long terme à des solutions. Dès lors, je regrette au plus haut point des actions comme celle du tribunal de la jeunesse francophone de Bruxelles ", a conclu Koen Geens.