Le jeu du chat et de la souris entre policiers et délinquants est devenu plus compliqué avec Internet et les smartphones. Les criminels ont souvent une (bonne) longueur d’avance. Le ministre de la Justice, Koen Geens (CD&V) a annoncé jeudi l’investissement de 6,5 millions d’euros dans des applications de haute technologie destinées à la police judiciaire fédérale. “On constate que les auteurs de faits graves recourent toujours à de nouvelles techniques. La lutte contre le crime doit évoluer avec ces nouvelles technologies. La réglementation aussi : les éléments de preuve numériques gagnent en importance.”
La nouvelle loi sur l’extension des méthodes particulières de recherche MPR (ou “Bom” pour “bijzondere opsporingsmethoden”), approuvée en mars 2016 dans le sillage des attentats de Bruxelles, veut moderniser les moyens des enquêteurs pour intervenir plus vite et plus adéquatement contre toutes les formes de criminalité, qui vont du vol au terrorisme.
Ces compétences sont strictement encadrées, avec toutes les garanties nécessaires pour la vie privée des citoyens, assure le ministre Geens.
Si les méthodes classiques ne suffisent pas
La loi MPR établit notamment un cadre plus précis pour ordonner, au cours de l’enquête, l’accès à des systèmes informatiques. Selon le cas, c’est un officier de police judiciaire, le parquet ou un juge d’instruction qui prend la décision.
Les enquêteurs pouvaient déjà explorer le smartphone saisi à la suite d’un fait criminel grave. Mais les règles n’étaient pas très claires : jusqu’où pouvaient-ils aller ? La loi sur l’extension des MPR le précise, comme elle fixe un régime spécifique pour effecteur des interactions et des infiltrations policières sur Internet.
Pour des faits criminels passibles d’une peine d’emprisonnement d’au moins un an, les agents qui ont suivi une formation spéciale peuvent prendre contact sous une identité fictive avec un suspect. Tous ces contacts doivent être enregistrés – une garantie qui ne s’applique pas lors d’une infiltration “classique”.
Quelles sont les nouvelles applications de haute technologie qu’emploieront les policiers ? Le ministre de la Justice refuse assez logiquement de donner des détails précis. Mais il indique que l’infiltration sur Internet peut, par exemple, s’avérer utile pour débusquer les auteurs d’un home-jacking. Il arrive en effet souvent que les malfrats tentent de revendre leur butin sur des sites Internet de ventes de deuxième main. Des policiers peuvent désormais légalement entrer en contact avec ces vendeurs en “undercover”, cachés sous de faux profils.
La loi sur les MPR permet aussi au juge d’ordonner une recherche sur le smartphone d’un suspect, à son insu. Un tel devoir ne peut être demandé que dans les enquêtes sur la grande criminalité, si les méthodes classiques ne suffisent pas.
An.H.