Le système de facturation sera simplifié. Le coût pour l’Etat devrait passer de 14 à 7 millions d’euros.
Les enquêtes sur les attentats de Paris l’ont montré une fois de plus : les techniques d’interception et d’identification des appels téléphoniques ou des communications électroniques jouent un rôle de plus en plus déterminant pour remonter jusqu’aux suspects. La manière dont l’Etat rétribue les opérateurs télécoms pour ces tâches – plus de 100.000 requêtes par an – est néanmoins source de tensions depuis des années.
L’Etat considère qu’il paie trop pour ces prestations, au regard de ce que les autres pays versent à leurs opérateurs et des avancées technologiques qui réduisent ces coûts d’année en année. Le budget avoisine aujourd’hui les 14 millions par an et constitue l’un des principaux postes de ce qu’on appelle les frais de justice (31 % des frais en 2011). De leur côté, les opérateurs se plaignent de recevoir des demandes sous toutes les formes, non standardisées, trop peu ciblées… et surtout de ne pas être payés à temps. L’Etat ayant accumulé un arriéré de paiement de plus de 40 millions d’euros qu’il a fini par apurer fin de l’année dernière après avoir été traîné en justice par Base et Mobistar.
Depuis 2009, des discussions sont en cours pour tenter de trouver une formule qui modère l’envolée des frais des écoutes téléphoniques tout en permettant aux opérateurs de couvrir leurs coûts, gage d’un service de qualité. Malgré des baisses de prix de 50 % imposées à deux reprises ces dernières années par l’Etat, le niveau de dépenses atteint l’année dernière a de nouveau retrouvé celui de 2007. En cause ? L’explosion des volumes.
Ces discussions entre l’IBPT (régulateur des télécoms), les opérateurs, la police et la Justice sont aujourd’hui sur le point d’aboutir. L’IBPT a soumis à consultation ce lundi un projet d’arrêté royal du ministre de la Justice Koen Geens et du ministre des Télécoms, Alexander De Croo, fixant une nouvelle grille tarifaire. « On pense que l’entrée en vigueur de celle-ci devrait permettre de diviser par deux les dépenses télécoms , explique Sieghild Lacoere, porte-parole du ministre Geens. On devrait passer de 14 à 7 millions d’euros par an » .
Simplifier le système pour baisser la facture
La principale économie sera réalisée au niveau des frais administratifs via une simplification du système. Quatre types d’opérations – les plus courantes – feront encore l’objet d’une tarification propre (interception de communications, observation en temps réel, observation de données historiques et observation dans un réseau). Toutes les autres – il y en avait 23 ! – ne seront plus facturées. En lieu et place, les opérateurs toucheront un forfait dont une partie leur sera versée tous les trimestres. Un budget d’1,3 million par an est prévu pour 2016 et 2017. Cela permettra de faire diminuer de façon drastique le nombre de petites factures. La moitié des requêtes adressées par la Justice ne représentait que 11 % des coûts. Les frais administratifs liés à celles-ci étaient souvent supérieurs au montant facturé.
Si la Justice espère voir fondre ses frais télécoms à ce point, c’est aussi parce que la nouvelle tarification se fonde sur les coûts réels de ces prestations. Ceux-ci ont été calculés par un consultant sur base des coûts d’un opérateur mobile important jugé « efficace », c’est-à-dire l’hypothèse de travail la plus défavorable au secteur.
Les opérateurs n’ont pas encore officiellement réagi aux tarifs qui viennent d’être soumis à consultation mais en coulisse, on reconnaît qu’une diminution était justifiée. « Vu l’importance des frais fixes, il n’est pas normal que l’augmentation du nombre de prestations se traduise par une augmentation de même ampleur des montants facturés. Une certaine dégressivité s’imposait. »
Selon nos informations, les opérateurs ont accepté le système à condition d’être remboursés des impayés (ce qui a été fait en 2015) et que soit mis en place un nouveau système baptisé TANK qui permettra dès 2018 un échange automatisé d’informations entre les opérateurs et la Justice dans le cadre des interceptions et qui devrait faire diminuer les frais de 15 %.
Au cabinet Geens, on espère que l’arrêté royal entrera en vigueur avant l’été.