Le mandat de protection extrajudiciaire rencontre un franc succès. Il permet aux Belges de désigner la personne chargée de gérer leur patrimoine le jour où ils n’en seront plus capables. Un dispositif qui permet aussi d’éviter les escroqueries…
De plus en plus de Belges protègent leurs avoirs. Pour cela, ils désignent une personne qui sera chargée de gérer leur patrimoine le jour où ils ne seront plus en capacité de faire. Créé fin 2014, ce mécanisme baptisé « protection extrajudiciaire » connaît un succès grandissant. En 2015, 11.932 Belges avaient pris les devants en établissant un mandat de protection extrajudiciaire. L’an dernier, ils étaient 54.956 à y avoir recours, selon la fédération royale du notariat belge. Chaque année, le nombre de nouveaux mandats enregistrés ne cesse d’augmenter. Entre 2018 et 2019, les notaires constatent une hausse de 48,2 % !
« Il y a une prise de conscience de la nécessité de rédiger de tels documents, c’est indéniable », confirme le notaire Sébastien Dupuis. « Mais il y a aussi le fait que la loi a changé. Autrefois, le mandat ne concernait que les actes patrimoniaux, c’est-à-dire ce que je peux faire avec ce qui m’appartient. Depuis mars 2019, on va aussi pouvoir indiquer dedans les critères de sélection d’une maison de repos par exemple ou ce que l’on souhaite au niveau des soins. C’est beaucoup plus personnel. »
Cette nouveauté a permis de convaincre davantage de Belges. En enregistrant un mandat de protection extrajudiciaire, on protège désormais à la fois ses avoirs et en plus, on prévoit ce que l’on veut pour plus tard. « On fait d’une pierre deux coups », résume-t-il.
Une fois pensionné, c’est le moment de recourir au mécanisme. Cela servira le jour où la personne n’aura plus toute sa tête… mais aussi en amont. « L’exemple type est cela de quelqu’un qui prend sa retraite et part faire un grand voyage », illustre Sébastien Dupuis. « Et alors qu’il est au fin fond de la Chine, on le rappelle pour des opérations juridiques. Il peut dès lors mandater quelqu’un pour le représenter. »
En aval, le dispositif permet notamment de lutter contre les abus de faiblesse, les escroqueries ou les captations d’héritage. « Quand on a une personne en état de faiblesse, la personne mandatée peut intervenir à temps pour arrêter les dégâts. C’est un sacré coup de main. »
Des garde-fous
Mais comment s’assurer que ce n’est pas la personne mandatée qui profitera de son « pouvoir » pour abuser d’une personne âgée ? « Déjà, la personne de confiance est désignée par la personne qui donne la procuration. Il lui appartient de se renseigner », explique le notaire. « Mais il y a un deuxième garde-fou. À la fin du mandat, lors d’un décès par exemple, la personne mandatée doit rendre des comptes. C’est à ce moment que l’on peut vérifier qu’il n’y a pas eu confusion d’intérêts. » Le mandant peut donner mandat à un membre de sa famille ou à une tierce personne. « Les personnes isolées se tourneront vers un tiers. Il arrive aussi que l’on préfère un étranger à un membre de la famille lorsqu’on ne s’entend avec ou qu’on s’en méfie par exemple. »
Le mandat entre en vigueur au moment de la perte des facultés intellectuelles du mandataire. Généralement, l’avis de deux médecins sera requis. Mais, une fois encore, c’est au mandat de déterminer les conditions précises de son entrée en vigueur. « C’est un document fait sur mesure », souligne Sébastien Dupuis. « Ce qui fait inévitablement varier le coût en fonction des demandes. » Généralement, le prix de départ d’une telle procédure tourne autour des 500 euros.
Sabrina Berhin