Le CD&V a les clés pour sortir de la crise. Qu’attendez-vous pour ouvrir la porte ?
“Nous sommes confrontés au résultat des élections, très compliqué. Aucune majorité idéologique n’apparaît clairement. Les trois partis traditionnels n’ont plus la majorité qu’ils avaient encore en 2014. Nous avions toujours compris de M. De Wever que, si le PS devenait incontournable dans le monde francophone, il essayerait de parler avec eux de ce qui lui semblait essentiel. C’est ce qu’on attend des deux grands partis, côté Nord et Sud : qu’ils se parlent en profondeur. Et se mettent d’accord pour savoir si une coalition entre eux est possible ou non.”
Le PS dit que c’est impossible.
“L’accent est différent côté francophone et néerlandophone. Dans notre opinion publique, il est important que M. De Wever soit tout à fait intégré dans les négociations. Réaliser un gouvernement minoritaire en Flandre est possible, nous savons compter. On l’a fait en 2012, puis on a fait l’inverse en 2014. Mais historiquement, le CD&V est le parti le plus proche de la N-VA. Vu le résultat des élections et la grande victoire du Vlaams Belang, il est très important pour tout parti flamand qu’il apparaisse qu’une coalition entre la N-VA et le PS n’est pas possible. Nous insistons souvent à contre-courant parce qu’en fin de compte, ce ne sera pas le Sud qui payera la facture électorale. Mais les partis du Nord.”
La facture électorale ?
“La facture électorale et du climat autour de ce nouveau gouvernement. J’ai siégé avec énormément de plaisir dans le gouvernement Di Rupo. Quand on le regardera à l’avenir, on dira que c’était un bon gouvernement. Mais au Nord, il n’était pas considéré comme ça. On n’a pas perdu les élections en 2014 mais la N-VA a énormément gagné. On considérait que ce n’était pas un gouvernement qui donnait aux néerlandophones ce à quoi ils avaient le droit.”
La note de Demotte/Bourgeois a conclu à l’impossibilité de réunir ces deux partis.
“Les deux partis n’ont pas tenu à diffuser dans le public les conclusions de cette note.”
Ces conclusions sont erronées?
“La note dit à deux reprises que ce n’est pas possible en vue d’une prochaine phase. ”
La situation a-t-elle évolué depuis que Coens/Bouchez ont remplacé Paul Magnette ?
“Il est bon que nous ayons au volant deux hommes conscients qu’une alliance PS/N-VA est préférable, sans appartenir à ces partis, autour d’un axe au centre. Cela donne une chance supplémentaire à cette formule : l’entretien de la semaine dernière entre M. Magnette et M. De Wever en a donné l’illustration.”
Le comportement de Bart De Wever a donné l’impression qu’il sabotait les négociations.
“Vous avez entendu les propos de mon président de parti (NdlR : “Les déclarations de De Wever ne sont pas très intelligentes.”) J’étais entièrement d’accord avec lui. Ce n’était pas sage de faire cela.”
Cela vous a-t-il fait douter de la volonté de la N-VA de gouverner ?
“Cela ne m’a pas conforté.”
Êtes-vous scotché à la N-VA ?
“Le CD&V a la faiblesse de bien connaître son électorat et la Flandre. Nous avons été le moteur de la réforme de notre État depuis 1970. Si le CD&V pense devoir faire son maximum pour donner des chances à une inclusion du tandem N-VA-PS dans le gouvernement fédéral, ce n’est pas sans raison. Nous ne sommes pas scotchés à la N-VA et nous sommes beaucoup plus forts qu’eux au niveau local. C’est parce que nous voulons le rester et que nous voulons la stabilité de ce pays que nous disons cela. Mais nous sommes des hommes et femmes raisonnables.”
Si on vous propose le poste de Premier ministre, cela pèsera dans la balance ?
“Cette question montre qu’on ne vit pas une situation normale. Quand il était le plus grand parti, le CD&V a toujours pris ses responsabilités et livré le Premier ministre. M. Di Rupo l’a fait aussi. M. Michel, sans que ce n’ait été son ambition, l’a fait d’une façon excellente mais avec une forte opposition interne à la fin car le premier parti ne livrait pas le Premier ministre. On n’aurait jamais eu droit à Marrakech si M. De Wever avait été au 16. Jamais. La coutume est que le premier parti donne le Premier ministre. C’est le signe que les deux plus grands partis ne prennent pas leurs responsabilités dans leur pays.”
Le Premier ministre devrait être De Wever ou Magnette ?
“Dans des conditions normales, oui.”
Votre parti ne veut pas se tromper. Mais le temps presse ?
“Il est urgent d’attendre. Il ne faut pas aller trop vite en besogne. Cela ne veut pas dire qu’il faut traîner.”
Cela fait tout de même 8 mois qu’on attend...
“C’est dangereux de ‘jump to conclusion’ (sauter à la conclusion). Le moment viendra où on pourra dire : on a une entente finale entre les deux, ou ce n’est pas possible. Si le moment n’est pas mûr le 13 janvier, oui, ce sera dommage et ce sera une chance manquée.”
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