Le ministre de la Justice Koen Geens est en train de zéroter sa lunette de tir en direction des jeux de hasard. Un avant-projet de loi concocté par ses soins et validé hier en conseil des ministres entend en effet sonner le glas de la promotion des paris et des jeux de hasard durant les transmissions de compétitions sportives et les spots publicitaires qui les entrecoupent, et ce "quel que soit le média", c'est-à-dire télévision et internet compris. Une interdiction étendue également aux tranches de 15 minutes précédant et suivant des programmes s'adressant aux mineurs et de manière plus générale avant 20h (sauf événements sportifs diffusés en après-midi, pour lesquels la publicité aura droit de cité avant et après la transmission). Enfin, les spots publicitaires devront tous inviter leur cible à "jouer avec modération".
Un resserrage de vis en règle alors que plusieurs chiffres font état d'une situation préoccupante. On parlerait en Belgique de quelque 116.000 joueurs en règlement collectif de dettes et de 26.000 ruinés. La Commission des jeux de hasard, organe sous tutelle du ministre de la Justice, comptabilisait également fin 2016 304.949 Belges interdits de jeux.
Mais le durcissement ne s'arrête pas là, puisque parallèlement, le nombre d'agence de paris sera réduit, passant de 684 à 600 établissements sur l'ensemble du territoire. Le nombre autorisé de machines "3: 3" (dont le jeu consiste à aligner 3 illustrations identiques) dans les débits de boissons sera lui plafonné à 4 et leur accès sera limité par un système de reconnaissance de carte d'identité. Les communes verront enfin leur marge de manoeuvre renforcée pour contrôler les activités de jeux qui se déroulent sur leur territoire et auront leur mot à dire dans l'octroi des licences pour ces machines.
"Moins d'incertitude"
Face à ce lot de mesures, le discours d'Alexis Murphy, CEO de la société de paris betFIRST et membre de l'Association belge des opérateurs de jeux de hasard , est dans le fond plutôt apaisé. "Au moins, on élimine de l'incertitude sur ce qui pourrait se passer à l'avenir. Or, on a besoin d'un contexte stable, notamment pour embaucher", affirme-t-il après deux ans de spéculations autour du projet. Egalement sondé, Yannik Bellefroid, managing operator de Ladbrokes Belgique, tient un discours alarmiste sur la possible extension aux salles de paris du système de contrôle Epis, qui doit permettre d'écarter les joueurs frappés d'une interdiction. "Cette situation serait dramatique pour Ladbrokes et pourrait remettre en question le futur économique de l'entreprise en Belgique" va-t-il jusqu'à affirmer. "Mais j'ai confiance dans ce gouvernement pour qu'il trouve une solution adéquate d'ici la seconde lecture."
ARTHUR SENTE