“On veut moderniser nos moyens de communication pour s’ouvrir davantage vers le monde extérieur, vers les musulmans comme les non-musulmans. La couleur dorée de notre nouveau logo rappelle l’âge d’or de l’islam, quand le monde musulman produisait de nombreux penseurs et scientifiques, tandis qu’il représente une carte de Belgique pour montrer notre ancrage sur le terrain. On vient aussi de créer un compte Twitter, qui s’ajoute à notre compte Facebook, car on veut toucher davantage les jeunes, et lutter ainsi contre le radicalisme” , a expliqué mercredi le président de l’Exécutif des musulmans de Belgique (EMB) Salah Echallaoui.
Celui qui préside depuis mars dernier l’organe chargé de la gestion temporaire du culte islamique, c’est-à-dire entre autres la formation et la nomination des imams, professeurs de religion islamique et aumôniers se rendant dans les casernes et les prisons, a insisté sur les avantages d’une communication plus moderne. “Cela permettra aussi de diffuser notre message en faveur d’un islam citoyen et respectueux du vivre ensemble”, a-t-il indiqué, alors que le ministre de la Justice et des Cultes Koen Geens (CD&V) siégeait à ses côtés.
Si présenter la création d’un site Internet digne de ce nom et d’un compte Twitter comme un important effort de modernisation peut sembler bizarre, la démarche est loin d’être anodine, assure Hassan Bousetta, docteur en Sciences politiques et sociales de la K.U. Brussel et expert des enjeux liés à la présence de l’islam et des musulmans dans l’espace public. “ Je pense que c’est un vrai pas en avant ! On sent depuis quelques mois une volonté de réforme et cela se concrétise. Je me souviens qu’avant, les journalistes avaient du mal à avoir une réaction de l’Exécutif. Il y a un changement avec Salah Echallaoui” .
Porter la voix des musulmans vers le monde extérieur, condamner en leur nom les attentats ou multiplier les initiatives en faveur du vivre ensemble, voilà ce que l’opinion et les autorités attendent notamment de l’EMB. Autant d’attentes qui témoignent d’une méconnaissance importante du rôle temporel dévolu par l’État fédéral à l’Exécutif, non habilité à s’aventurer sur le terrain spirituel.
L’islam sunnite se caractérisant par ailleurs par une absence de hiérarchie religieuse, la légitimité de l’EMB est souvent remise en question.
Reste que l’exécutif , avec des moyens financiers extrêmement limités, a lancé plusieurs réformes, celle de la formation des professeurs de religion est présenté par le monde universitaire comme une réelle avancée. Quant à la formation des imams, elle se met doucement en place. L’EMB, qui tire sa légitimité du vote des 300 mosquées du pays, pourrait faire vraiment plus pour ancrer ses membres au sein de la société belge, selon l’islamologue de l’ULg Radouane Attiya. “Il y a encore beaucoup trop d’imams qui ne parlent pas une langue nationale et l’EMB n’avance pas assez sur l’ouverture aux femmes et aux minorités” .
Des chantiers auxquels s’attelle l’EMB, promet Salah Echallaoui. Celui qui est président bénévole, son institution manquant d’argent, réclame plus de temps pour être jugé.
Julien Thomas