Les transferts des détenus vers les palais de justice coûtent cher. Pour gagner du temps et de l’argent, on va désormais pouvoir organiser les audiences devant les chambres du conseil et chambres des mises en accusation par vidéoconférence ! Tout sera en principe prêt pour le 1 er septembre 2017.
En 2013, le transfert de Marc Dutroux de la prison de Nivelles au palais de justice de Bruxelles avait fait grand bruit. Selon les syndicats de police, cela avait coûté 50.000 euros de déplacer le plus grand criminel de Belgique devant le tribunal d’application des peines. Il faut dire qu’il avait été placé sous très haute surveillance et avait mobilisé une armée de policiers !
Tous les transferts, heureusement, ne coûtent pas aussi cher mais on sait que le ministre de la Justice court après le moindre cent… Ainsi, il a réussi à faire voter une loi permettant dorénavant d’organiser les audiences en chambre du conseil ou en chambre des mises en accusation, par vidéoconférence. Concrètement, le détenu n’ira pas au palais de justice : il restera en prison et parlera au juge par caméra interposée. Attention, c’est une possibilité. Cela ne veut pas dire que cela se passera toujours ainsi.
Comment cela fonctionnera-t-il ? La loi est très vague. On attend un arrêté royal pour la mettre en œuvre. Ce qui fait d’ailleurs bondir avocats.be. « Lors des débats au parlement, on s’est vivement opposé à ces vidéoconférences », indique Laurence Evrard, pour avocats.be. « Car les droits de la défense ne seront pas garantis. Ces audiences par caméras interposées ne vont pas rendre le non-verbal, qui peut être très important. Qui vous dit que le substitut et le juge ne vont pas se faire des signes, hors caméra et donc sans que le détenu ne s’en aperçoive ? La moindre des choses était aussi de prévoir l’accord préalable du détenu. Or, la loi ne dit rien là-dessus. Elle ne dit pas non plus où sera l’avocat : à côté du détenu en prison ou avec le juge, de l’autre côté de la caméra ? Toutes ces questions seront sans doute réglées dans un arrêté, sur lequel nous n’aurons plus aucune prise. Nous envisageons dès lors d’attaquer cette loi du 29 janvier (Moniteur Belge du 19 février) devant la Cour constitutionnelle. »
Du côté du cabinet du ministre Geens (CD&V), on annonce vouloir lancer la vidéoconférence au 1 er septembre 2017. « La prolongation de la détention préventive n’est pas une procédure si lourde », indique la porte-parole Sieghild Lacoere. « De nombreux détenus sont transférés pour des procédures qui prennent peu de temps (comme la prolongation de la détention préventive). Et les détenus n’aiment pas les transferts, car ils sont menottés et doivent souvent attendre une journée dans une cellule. »
par câbles téléphoniques
Les 36 prisons vont chacune équiper un local d’une caméra et d’un écran permettant la vidéoconférence. Tout passera par un câblage sécurisé. Le marché du câblage (3 à 4 millions d’ €) a été attribué à la société Van Den Berg. Ces câbles permettront aussi (et surtout) d’installer un téléphone dans chaque cellule. Caméras, écrans et téléphones seront fournis gratuitement par la société qui décrochera le 2 e marché. Société qui « se paiera » sur les appels téléphoniques facturés aux détenus.
La vidéoconférence n’est pas prévue pour les audiences devant le TAP. Là, l’économie a été trouvée en organisant les audiences en prison.
F. DE H.