Un important plan de réformes de la justice a été présenté mercredi à la Chambre par le ministre de la Justice Koen Geens (CD&V). Objectif affiché : rendre l'institution plus moderne et plus efficace. Parmi les différentes propositions du plan on retrouve notamment : la suppression des peines de prison de moins d'un an et la libération conditionnelle instaurée à la moitié de la peine. Mais ces mesures sont-elles d'abord un moyen de faire des économies ?
Non, ce nouveau plan de justice n'est pas un moyen de faire des économies pour le ministre CD&V Koen Geens qui souligne que "ce plan aurait été tout aussi utile dans un autre contexte budgétaire." L'austérité et la rigueur budgétaire étant cependant "une opportunité".
Selon lui, "il y a encore trop de choses qui n'ont pas dépassé le 19ème siècle. Siècle où Napoléon a construit tout notre droit, notre organisation judiciaire et nos arrondissements." Exemple : "Chez nous, nous avons 350 bâtiments dédiés à la justice, alors qu'au Pays-Bas il n'y en a que 35." Alors entretenir 350 bâtiments à l'heure actuelle "avec notre budget c'est énorme", explique le ministre tout en étant conscient que ces bâtiments traduisent une justice plus proche de ces citoyens : "La proximité je ne la remets pas en question (…) mais il faut utiliser nos moyens de la meilleure façon possible."
La libération conditionnelle instaurée à la moitié de la peine
Motivation de cette mesure ? "La réinsertion." Un moyen pour le ministre de "rendre davantage possible une vraie rééducation au sein de la prison (…) Après 2/3 de peine dans un cas de récidive, il y a beaucoup de détenus qui ne sont plus intéressés par la réinsertion et qui attendent la fin de leur peine pour justement ne pas subir des mesures de libération provisoire, de rééducation."
Plus de peine de prison de moins d'un an
"Evidemment, il faudra bien veiller à ce que les faits sanctionnés d'une peine de prison de moins d'un an soient sanctionnés correctement", signale Koens Geens. Il ajoute : "Si jamais on pense que l'un de ses faits devrait faire l'objet d'une peine de prison plus lourde, on peut toujours changer l'échelle des peines à cet égard." Mais pour le ministre il est avant tout question de chercher des peines alternatives, capables de remédier le mal en question car "en général on prend de mauvaises habitudes quand on est si courtement en prison, il y a peu d'amélioration de la personne."
Plaider coupable à l'américaine
C'est-à-dire décider à la base de plaider coupable ou non coupable : "Je pense qu'on va dans ce sens. Ce sera le résultat d'une transaction entre le parquet et l'inculpé." Dans le cas d'une transaction pénale en tant que telle, "il faudrait mentionner le fait de la transaction dans le casier judiciaire de sorte que l'on n'oublie pas à l'avenir les règles de récidive." C'est à dire : demander une plus grande peine venant du parquet lorsqu'il y a déjà eu une transaction importante.
Mais n'est-ce pas un moyen de passer à côté d'un procès (et Bertrand Henne de citer l'affaire Chodiev) pour récupérer des sommes, quitte à ce qu'il y ait impunité ? Pour le ministre, "il n'y a pas pour la justice de bonus à conclure des transactions pénales. Un magistrat qui négocie une transaction, n'en gagne pas plus par après." Cependant il rappelle à ce sujet l'importance chez les magistrats de "juger de façon autonome et sans influence si la transaction est une bonne chose ou pas."
Ce plan n'est donc pas pour le ministre de la Justice le triomphe des avocats d'affaires mais plutôt "la victoire du parquet, qui, a un moment donné, juge de la meilleure chose à faire."
Economies dans le secteur de la Justice
Oui, la justice va réaliser les économies qui lui sont imposées : "Mais pour prendre le virage, il faut faire des investissements en législation, en infrastructures et il faut restructurer les dépenses. Les effets ne seront sensibles que fin 2015, début 2016. Donc on maintient le plan, les montants totaux en tout cas, même si j'aurais préféré que l'on change le rythme."
Enfin concernant la place du CD&V au sein du gouvernement fédéral, Koen Geens pense que son parti, bien que ça ne soit pas toujours facile, tente de rester cohérent et de défendre ses valeurs.
Quant au rôle du Premier ministre, Charles Michel : "Je trouve qu'il joue un match difficile. Il doit arbitrer entre trois partis flamands mais je trouve qu'il le fait avec beaucoup d'aisance."
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